Vitruve Pour Mémoire

 Archives

 Accueil

 Cette brochure, ronéotée, au format A4, 14 pages recto verso est un document de présentation de l'école à destination des parents. Il a été distribué au début de l'année scolaire 1968-1969. Nous avons essayé de respecter la présentation, les surlignages, titres et paragraphes.

ECOLE ACTIVE VITRUVE
école publique mixte - 3 rue Vitruve - Paris XXè - téléphone MEN 22 - 68


 que votre enfant
entre ==>
au cours préparatoire

 

qu'il vienne d'une
autre école élémentaire

 

 C'est une nouvelle étape.
Mais l'entrée à la "grande école" ne doit pas être présentée à votre enfant comme un événement grave, donc impressionnant : nous nous efforçons, au Cours Préparatoire, d'éviter la rupture hélas habituelle avec le travail éducatif entrepris en grande section maternelle.

L'initiation à la lecture, à la mathématique se poursuit dans notre école avec la même volonté de respecter les rythmes individuels des enfants.
Vous trouverez dans cette brochure réponse à un certain nombre de vos questions.

Nous souhaitons obtenir non seulement votre confiance, mais votre collaboration pour mener à bien notre tâche commune d'éducateurs. C'est pourquoi nous comptons sur votre participation actives aux réunions qui vous seront proposées.

 Prenez contact avec l'institutrice ou l'instituteur. Sachez que le probable changement de méthodes et de discipline va désorineter votre enfant... et peut-être vous même plus encore. Ne vous effrayez pas ! Il faut souvent plusieurs mois avant que l'enfant s'adapte véritablement... et parfois un certain temps aux parents pour être convaincus du bien fondé de nos attitudes pédagogiques.
Lisez attentivement cette brochure, informùez-vous, participez aux réunions qui vous sont proposées. L'adaptation, l'épanouissement de votre enfant dépend en partie de votre confiance...

==> lisez et conservez cette brochure !

 

Nous vivons dans un monde où tout évolue très vite :
Les enfants :
Il sont plus éveillés, plus indépendants qu'autrefois mais aussi plus nerveux, plus "discuteurs", plus désobéissants. Ils portent des jugements sur leur entourage, et surtout, la crainte et le respect des adultes n'est plus comme autrefois la base de leur éducation.
Ils vivent dans un monde agité, angoissé. Les échos et les images des vio lences qui déferlent sur le monde les atteignent chasue jour.
Ils respirent un air vivié, souffrant d'un manque de calme, d'espace, de nature. S'il est vrai que les parents respectent mieux qu'autrefois leur personnalité, par contre, la vie familiale s'est souvent détériorée : bien souvent, la mère travaille, le père ne voit ses enfants qu'une ou deux heures par jour, la télévision prend la place des conversations qui renforçaient les liens familiaux.
Dans ces conditions nous affirmons :

 Il n'y a pas d'enfants paresseux

mais seulement des enfants fatigués, en mauvaise santé physique ou morale...

 Il n'y a pas d'enfants insolents

mais seulement des enfants tendus, inquiets ou qui souffrent de solitude morale.

Le travail :
A l'époque des voyages interplanétaires et de l'automation, on estime que l'enfant d'aujourd'hui devra, devenu homme, changer trois fois de métier au cours de sa vie. La société industrielle moderne exige de plus en plus des travailleurs ayant une formation générale étendue, un esprit ouvert, capables de s'adapter à des situations nouvelles, apte au travail en équipe...
Ce qu'on nommait autrefois le "savoir", c'est-à-dire des connaissances encyclopédiques obtenus par bourrage de crâne, travail forcé "bachotage" est devenu aujourd'hui inaccessible étant donné l'étendue extraordinaire de ces connaissances et plus grave, l'enseignement qui y conduisait est incapable d'engendrer les qualités requises par la société moderne.
Ces qualités correspondent à un progrès intellectuel (curiosité, esprit scientifique) et moral (sociabilité) pour les développer :

 Il est indispensable de réformer profondément l'Enseignement.

La vie sociale :
La société moderne met à notre disposition des instruments extraordinaires que nos grands parents et même nos propres parents ne connaissaient pas.
Ces moyens peuvent nous servir ou nous asservir...
La télévision et la radio, mises au service de la publicité commerciale et de la propagande politique, intoxiquent peu à peu la vie des individus comme elles intoxiquent la vie publique...
La grande presse abondamment affichée et diffusée propose comme modèles les "idoles", avec leur Jaguar, les impératrices avec leurs diamants, les princesses avec leurs amours... La célébrité et l'argent (... des autres) sont donnés en pâture à ceux qui n'ont rien.
Il n'est pas étonnant que sous cette pression continuelle, les adolescents éproouvent des désirs irréalisables et que les plus démunis d'entre eux sur le plan affectif sombrent dans la délinquance.

 Il est urgent de former des esprits capables de résister à cette forme moderne de l'oppression.

L'école devant ces problèmes :

L'école "traditionnelle" :
Elle n'était pas préparée à cette évolution de l'enfant, du travail, de la vie sociale.
Autrefois il s'agissait de faire ingurgiter le plus vite possible et d'une manière autoritaire, un minimum de connaissances à une masse d'enfants n'allant pas plus loin que le certificat d'étude, et de les préparer à une vie bien peu différente de celle de leurs grands-parents...
Une toute petite minorité (enfants des classes riches) poursuivait ses études. Les conditions matérielles à la maison (confort), au lycée (classes et professeurs en nombre suffisant), la culture du milieu familial, l'aide des parents ayant eux-mêmes fait des études, l'assurance d'avoir de toutes manières une place privilégiée dans la société, facilitaient les études et rendaient moins sensibles les limites et les défauts de l'école traditionnelle, perpétuant l'école du passé.

L'école actuelle
Un profond besoin de changement commence à se faire sentir. Cependant, l'école actuelle, malgré l'évolution de la société, malgré l'augmentation du temps de scolarité obligatoire, demeure celle que vous avez connue avec ses leçons de morale hors des préoccupations quotidiennes de l'enfant, ses punitions, ses prix, ses notes de conduite -- qui n'ont jamais transformé les "mauvais" élèves --, ses cancres au fond de la classe marqués à vie, ses résumés d'histoire, ses devoirs du soir (officiellement interdits...) etc...
Elle est en tous cas bien mal adaptée à ses objectifs puisqu'on y rencontre 52% d'enfants en retard au CM2 (7ème)(statistique nationale 1954) et les redoublements se poursuivent dans les classes secondaires à quoi il convient d'ajouter les abandons et les échecs...

Il faut donc faire face à la réalité, penser aux besoins de demain, prévoir et construire :

L'école de demain...
L'école de demain devra permettre l'épanouissement de toutes les facultés de l'enfant, qu'elles soient d'ordre intellectuel, physique ou artistique, en priorité sur les objectifs des plans économiques. La qualité des individus ainsi formés enrichira très vite la société. Le développement de l'esprit scientifique répondra aux nécessités de l'industrie. La culture (physique et esthétique), le goût de la créativité (artistique et manuelle) permettront une utilisation des loisirs intelligente et heureuse.
Pour lutter contre l'inégalité des chances, provenant du milieu social, des conditions de vie et de santé, l'école devra offrit à l'enfant un milieu culturel complémentaire (clubs du soir, du jeudi, organisation de vacances enrichissantes). Une équipe de médecins, psychologues, rééducateurs, prêtera ses services à chaque groupe scolaire.
L'action de l'école devra s'étendre aux adultes : largement ouverte aux parents qui participeront à sa gestion, elle sera également un centre de culture et d'échanges qui rayonnera sur le quartier.
Les maîtres recevront une formation approfondie, générale, spécialisée e t psychologique. Ils travailleront en équipe en collaboration avec les services de la recherche pédagogique et bénéficieront de recyclages fréquents. Leurs rapports avec les élèves dégagés de tout autoritarisme rendront possible la "communication" des élèves avec eux-mêmes et des élèves entre eux, conditions essentielles de toute éducation et de toutes socialisation.
Les bâtiments sans étages abriteront un petit nombre de classes à effectifs réduits, classes vastes, aménagés avec des coins ateliers, des lavabos. Ils posséderont préau, réfectoire, gymnase, terrain de jeux attenant, cour fonctionnelle. L'équipement moderne (électrophones, magnétophones, appareil de radio-télévision) et le matériel seront assurés sasn parcimonie. L'école à tiers temps (éducation intellectuelle - physique - culturelle) pourrait être ainsi réalisée.
Tous les enfants bénéficieront de la piscine, de classes vertes et de classes de neige. Un autocar rendra possible des sorties, enquêtes ou plein-air fréquentes.


 Cette école de demain n'est ni utopique, ni insensée, ni impossible. Il suffirait qu'on considère sa réalisation comme un investissement plus profitable à la société que les dépenses consacrées à la bombe H, aux fusées spatiales et autres "Mirages".

Prise de conscience...
La critique de l'école traditionnelle (et de l'université en général) n'est pas nouvelle. Il aura fallu des événements spectaculaires et dramatiques pour que le grand public et les pouvoirs publics commencent à prendre conscience de son bien-fondé. De grands réformateurs (Decroly, Freinet) et de grands psychologues (Wallon, Piaget) ont dégagé en théorie et en pratique certaines grandes lignes d'une école fonctionnelle adaptée véritablement à l'enfant. Quelques "écoles nouvelles", le plus souvent privées et recevant des enfants socialement favorisés existent depuis longtemps. Plusieurs milliers d'instituteurs travaillent également dans cette voie, isolés dans leur propre école, et leurs efforts courageux sont souvent rendus inutiles de ce fait.

et premier pas de l'école publique...
Il a fallu attendre 1962 pour qu'un Inspecteur, M. R. GLOTON, obtienne l'autorisation DE REGROUPER des maîtres volontaires dans 3 écoles de sa circonscription et lance l'école publique dans la voie de la rénovation indispensable. La presse et la télévision ont à plusieurs reprises mentionné leur existence et leurs travaux. Leur organisation et les méthodes qui y sont employées dans la pédagogie du français et de la mathématique, sont reprises dans certains projets de réforme actuellement à l'étude ou en cours d'application.
Dans la circulaire 1.812, concernant la Rentrée 1968, l'Inspecteur Général de l'Instruction Publique recommande aux Inspecteurs Primaires "d'encourager toutes les recherches ou initiatives qui tendront à développer la personnalité des enfants et leur sens des responsabilités, et à favoriser le travail déquipe et l'utilisation des méthodes actives". Il propose donc à toutes les écoles d'adopter les objectifs qui sont les nôtres depuis 6 ans.

Hélas...
Notre école est loin de cette "école de demain" que nous avons décrite. L'esprit qui anime les maîtres y correspond mais les conditions matérielles ne sont sur aucun point réunies.
En décrivant notre école "sous-développée", nous voulons au passage éclairer les parents sur les difficultés que nous rencontrons chaque jour en essayant malgré tout de réaliser notre projet éducatif... et sur les carences de l'éducation nationale.
Bien que jouant le rôle d'école pilote, notre école ne bénéficie d'aucun crédit particulier. Il lui est même impossible d'utiliser les très pauvres crédits existants d'une manière autonome. Ainsi cette brochure est réalisée et payée par les parents et par les maîtres.
Locaux conçus dans une optique "d'école caserne", où l'enfant était destiné à se tenir assis pendant 6 heures et à "exploser" pendant les récréations dans u ne cour sans attraits. Etages à monter, même pour les petits, classes sombres, petites, inadaptées (lumière électrique toute la journée, pas de poste d'eau) tables encombrantes et mal conçues. Pas d'abri dans la cour, préau servant de réfectoire, de gymnase, de salle de chorale (parfois simultanément !!). Bruit continuel et surpopulation de la cour occasionnés par la cohabitation du C.E.G. avec les classes primaires.
Matériel insuffisant, absence de moyens de transport - autocar). Un terrain de sport mal conçu ne pouvant recevoir que 2 classes 2 après-midi par semaine (pour 10 classes), etc... etc...

pourtant, notre école n'est "pas comme les autres"

En dépit des mauvaises conditions matérielles, qui entravent notre action, notre école n'est cependant pas comme les autres dans la plupart des domaines...
Il est donc indispensable que nous décrivions les particularités le plus brièvement possible, étant bien entendu que nous sommes toujours à la disposition des parents et de leur Association pour répondre à toute question.

L'école active de la rue Vitruve :

Organisation
- Les maîtres travaillent en équipe. Ils peuvent ainsi échanger informations et procédés, unifier les méthodes, prépartir les programmes, étudier les cas d'enfants difficiles ou en difficultés, organiser l'orientation des enfants, etc...

- Les maîtres suivront les enfants "3 ans ou 2 ans"
CP, CE1, CE2 ------ CM1, CM2 ------ 6ème, 5ème (Collège)
Les enfants seront ainsi mieux connus, mieux compris, le rythme des acquisitions est mieux adapté, les perturbations psychologiques dues aux changements de maîtres réduits...

- Horaires : petites classes (1er cycle) 9h - 12h ------ 13h30 - 16h
( 2ème cycle) 8h30 - 12h ----- 13h30 - 16h
congé : samedi après-midi et jeudi
Le système mieux équilibré : lundi-mardi-mercredi matin-jeudi-vendredi
n'est malheureusement pas actuellement applicable.

Le temps dégagé le samedi après-midi est utilisé (largement) pour les réunions des maîtres, l'horaire décalé du matin tient compte des différences de résistances physiques des enfants selon l'âge (expérience officielle "école désenclavée").

- La liaison avec l'école maternelle est établie et le cours préparatoire s'efforce de constituer une classe de transition harmonieuse entre celle-ci et l'école primaire.

- A l'autre extrémité, une 6ème et une 5ème du Collège assurent dans le même esprit que les classes élémentaires et avec les mêmes méthodes, la transition si difficile avec le premier cycle secondaire.

- Enfin 1969 sera l'année de la mixité.
Existant depuis toujours à l'école maternelle, de plus en plus répandue au Lycée, automatique au C.E.S., la mixité devait faire son entrée à l'école élémentaire parisienne. Fréquente en banlieue, à la campagne, elle a fait les preuves de son intérêt : méthode et lieu unique pour les enfants d'une même famille, association des qualités et atténuation des défauts de chaque sexe, enfin élimination des préjugés stupides qu'engendre une séparation injustifiée.

L'esprit de l'école
Tout apprentissage ne se fait valablement que lorsque l'individu se sent vraiment concerné, lorsqu'il désire profondément accéder à la connaissance (importance de la motivation) et surtout lorsqu'en dehors de toute pression il s'engage de lui-même dans la voie de cet apprentissage.
C'est vrai pour les adultes comme pour les enfants et les observations de la psychologie et de la psychothérapie convergent dans ce sens qui est aussi celui du bon sens...
Si beaucoup de pédagogues, qui ont pourtant maintes occasions de vérifier le bien-fondé de ces conceptions, hésitent encore à les admettre, c'est qu'elles rendent le travail quotidien de l'enseignant difficile, peu confortable, parfois angoissant (pour certains enfants, il faut savoir attendre pour qu'elles portent leurs fruits, alors que nous sommes tous hantés par la recherche de résultats immédiats).

 S'il est vrai que "IL FAUT SAVOIR PERDRE DU TEMPS POUR EN GAGNER" (Rousseau), nous demandons aux parents de réfléchir à ces simples faits :
l'espérance de vie est de 70 ans. Qu'est-ce donc que 6 mois ou 1 an dans toute une vie ? N'est-il pas préférable, pour les enfants qui en ont besoin, d'avoir le temps d'apprendre pour conserver l'envie d'apprendre ?
(Les enfants qui ont rencontré l'échec dès le cours préparatoire n'ont plus qu'un but, lorsqu'ils atteignent l'âge de 12 ans : quitter l'école. Il leur faudra cependant patienter jusqu'à l'âge de 10 ans, obligatoirement, et avec toutes les conséquences que cette situation comporte !)

L'expérience que nous avons vécue dans notre école depuis sa création, facilitée par le système des cycles, nous poussera de plus en plus à tirer les conséquences logiques de ces idées. Et là encore une réflexion commune avec les parents sera indispensable.

Une méthode unique
Les recherches que nous avons conduites dans l'apprentissage de la lecture, de la langue écrite (grammaire, orthographe), de la mathématique moderne, etc... depuis la création de l'école, nous autorisent à nous réclamer d'une méthode unique pour toutes les disciplines. La démarche est la même avec des rythmes différents selon les matières : observation d'un fait global - analyse - synthèse.
La durée de chaque étape peut tenir en plusieurs minutes ou en plusieurs mois (lecture). Méthode analytique donc qui s'oppose à la méthode "synthétique", laquelle part de l'élément pour peu à peu construire l'ensemble.
La théorie des "ensembles" qui est à l'origine du renouvellement de l'enseignement mathématique et qui trouve application dans presque toutes les disciplines, renforce le bien-fondé de la méthode "analytique" que nous suivons.

Objectifs scolaires

Programme : tout en suivant d'autres voies que celles de l'école traditionnelle et avec d'autres rythmes (et d'autres objectifs), nous nous proposons de faire acquérir en fin de cycles (CE2 et CM2) les connaissances de bases correspondant au programme officiliel actuel. Celui-ci en pleine évolution, est encore bien discutable mais nous devons compte d'éventuels changements d'école.
Lectures : la méthode d'apprentissage ne se fixe pas de délais pour aboutir (contrairement aux écoles traditionnelles qui se fixent "Pâques" pour les 2/3 de la classe, le 1/3 restant étant en partie "rattrapé"... momentanément. 23% redoublant le C.P. (selon les statistiques déjà citées). Ce qui importe est, non pas que l'enfant ânone le plus tôt possible, mais qu'il, aborde de plain-pied "la lecture intelligente". Nous pensons qu'il y a ainsi plus de chance de développer un goüt véritable et durable pour la lecture, qui est en définitive le but recherché. La période d'apprentissage peut donc s'étaler de 3 mois à 2 ans, selon l'équilibre psychologique, la maturité de l'enfant, selon le milieu (le fait qu'on lise peu ou beaucoup à la maison est de première importance).
Seuls les enfants qui, pour des raisons particulières, n'ont pas du tout démarré en fin de CP, redoublent. La méthode employée, qui ne présente pas de répétition, évite en grande partie le sentiment d'échec que crée le redoublement.

Recommandations !

 Nous demandons instamment aux parents de se conformer aux conseils donnés par les maîtres et de n'intervenir dans l'apprentissage qu'en accord avec eux.
L'enfant qui rencontre des difficultés quelconques ne doit pas les coir augmenter par une attitude des parents qui contrarie le travail des maîtres !
Ce sont les maîtres qui sont des techniciens et non les parents !

En tous temps :
Valorisez la lecture à la maison...
Ofrez des livres, leur prix est accessible à tous ! (selon l'âge : mini-livres, bibliothèque rose, 2 coqs d'or, bibliothèque verte, etc...)
N'acceptez que des illustrés de qualité (Francs-jeux, en vente à l'école) et le moins possible.
Encouragez la fréquentation de bibliothèque enfantine (rue Sorbier) etc...
Langue écrite : diverses motivations aboutissent à la rédaction de "textes libres" dont l'exploitation est variée selon les âges et les maîtres (journaux, livres, imprimerie, correspondance, etc...)
Orthographe : collection de mots, d'accords, observation, classements (ensembles), les règles sont progressivement découvertes - exercices divers (la dictée n'étant plus un moyen d'apprentissage mais un contrôle périodique).
Grammaire : (dite fonctionnelle ou structurale) la priorité est donnée à la fonction des groupes de mots (termes) dans la phrase et non à la nature des mots qui conduit traditionnellement à la confusion la plus totale... La Grammaire n'a pour but que d'assurer une meilleure compréhension de la langue, et plus tard aider l'étude des langues étrangères.
Mathématique : plus qu'en toute autre matière, il y a rupture radicale entre ce que vous avez connu et ce que nous enseignons.
Une vaste réforme a été entreprise, de la Maternelle à la Faculté.
Les mathématiciens, en effet, considérent que l'enseignement traditionnel est par certains côtés faux, par d'autres inutiles, et que son inadaptation psychologique et la mécanisation pratiquée contribuent à rendre cette science essentielle étrangère à la majorité des élèves et étudiants.
Il est impossible de décrire ici méthodes et objectifs. Nous pouvons simplement signaler qu'à l'école comme dans le monde moderne, "la" mathématique ne s'intéresse pas seulement aux nombres mais aussi à la logique (les ordinateurs)...
Les maîtres ont suivi certains stages, lu des ouvrages. Le travail d'équipe permet initiation, échanges et progrès. Ils sont assistés d'un conseiller spécialisé.
Répondant à un besoin d'information, ils ont organisé des cours à l'intention des parents dont le succès est très encourageant.
Il est donc évident que les parents non informés ne doivent en aucun cas intervenir dans le travail de leur enfant : entre autres exemples, l'apprentissage de la division n'est abordé, dans toute sa complexité, qu'au CE2. Commencé au CP dans les autres écoles, il ne peut pas échapper à une mécanisatio, sans compréhension et est de ce fait très néfaste.
Là, comme ailleurs, les parents croyant devoir faire "rattraper" un "retard" apparent, rendent à leur enfant un très mauvais service.
Histoire Géographie, Sciences
: il est établi que ces matières ne peuvent être utilement étudiées qu'après 11 ans.
"L'ignorance des connaissances" élémentaires (étudiées dans la plus grande confusion : que signifient pour un enfant de 9 ans, le Serment du jeu de Paume, un delta ou un golfe ?) n'est pas à craindre, celles-ci étant au programme des classes assurant la scolarité post-primaire maintenant obligatoire. C'est à 11 ans (en 6ème) que la maturité d'esprit acquise, la curiosité tôt éveillée et qui se tourne de plus en plus vers l'extérieur, permettent l'acquisition rationnelle et à cet âge nécessaire de connaissances historiques et scientifiques.
Cependant, dans l'esprit de nos méthodes et à la faveur de circonstances accidentelle ("surprises" apportées en classe, faits d'activité) ou organisées (sorties, enquêtes, correspondances, etc...), ces matières sont abordées dans les classes élémentaires avec fruit, parce que vécues et non livresques. Elles justifient alors les travaux personnels ou en équipe, expositions, causeries, etc...
C'est surtout dans ce domaine que le travail à la maison peut être encouragé : aide dans la recherche de documents, la constitution de collections, dans l'élaboration de petites monographies, la préparation de causeries.
Télévision scolaire : quand la qualité des émissions et les conditions matérielles le permettent, l'utilisation de la T.V.S. n'est pas négligée, tant pour l'ouverture sur le monde qu'elle permet que pour l'apprentissage de son utilisation : apprendre à voir, appréciations critiques, compte-rendus, etc...

Objectifs éducatifs
Conformément aux objectifs que nous fixons à "l'école de demain", nous donnons la priorité :

- à l'expression et à la communication sous toutes leurs formes (orale, écrite, graphique, corporelle, etc...) et non au silence et à l'immobilité qui sont les moyens insensés et inhumains que l'école traditionnelle utilise pour atteindre ses objectifs.

- à la compréhension et non à la mécanisation (voir plus loin : grammaire, mathématique, etc...)

- à l'esprit de découverte, d'observation, bases de l'esprit scientifique, et non à la révélation de vérités (parfois changeantes ou bien inexactes...)

- à l'esprit d'initiative et non à un univers d'interdictions (crainte du bruit, du désordre, des "accidents", etc...)

- à la curiosité intellectuelle et non à un univers étriqué des manuels.

- à l'esprit d'équipe, à la coopération et non à l'individualisme, qui engendre, avec l'esprit de compétition, la prétention des uns, la résignation des autres, la jalousie, l'envie, les désastreux sentiments d'infériorité...

- à la discipline découverte peu à peu comme une nécessité de la vie en commun et non à celle imposée par des adultes (pas toujours capables d'en respecter une eux-mêmes) Punitions et récompenses sont donc, dans cet esprit, injustifiées.

- au travail considéré comme une activité satisfaisante en soi (école active) et non comme le moyen d'obtenir bones notes, bon classement, d'éviter des sanctions déplaisantes, de "faire plaisir" à papa, à la maîtresse...
Classements et notes ne sont donc pas utilisés. Selon les maîtres et les âges des graphiques de progression, le nombre de réussites dans une épreuve de contrôle peuvent être indiquées aux parents dans le livret, en supplément à la description détaillée du comportement de leur enfant.
Le rôle essentielle de l'école réside aujourd'hui dans ces objectifs éducatifs. C'est depuis longtemps la conviction de l'aile marchante des enseignants. C'est aujourd'hui celle de tous ceux qui se penchent sur les problèmes brûlants de la réforme de l'Université (y compris le Ministre de l'Education nationale : discours du 25 juillet 1968 et l'inspecteur Général de l'Instruction Publique, circulaire déjà citée).

 Nous avons formulé ces objectifs sous une forme volontairement brutale, afin de provoquer la réfléxion, l'étonnement et surtout la discussion que nous souhaitons avoir avec vous. Nous sommes en effet convaincus que, pour aboutir, notre action éducative doit s'associer étroitement à celle des parents. - (voir plus loin)

Pour une éducation civique et morale authentique :
une importante institution, "la coopérative"

La participation financière périodique, même minime, que nous demandons aux parents pour assurer l'équipement en livres de bibliothèque et de documentation, le matériel d'éducation esthétique, etc... est un élément secondaire, bien qu'important, de l'idée de coopérative (tout enfant bénéficie du capital matériel accumulé dans les classes).
La classe, l'école, constituent des petites sociétés dans lesquelles enfants, maîtres et directeur coopérent à une oeuvre commune. La "Coopérative" se propose, sous des formes d'organisation variées et variables, de faire prendre conscience de ce fait aux enfants, de les engager à oeuvrer au bon fonctionnement de ces sociétés, de découvrir et de formuler les lois qui doivent la régir tant sur le plan du travail que de la discipline. Des "conseils de coopérative" sont tenus périodiquement où tous ces problèmes sont abordés, où les conflits sont réglés ou dédramatisés, où les revendications formulées éventuellement, où les responsabilités sont partagées et critiquées, etc...
A travers cette institution, les véritables problèmes moraux et sociaux sont abordés d'une manière authentique et accessible aux enfants. Ceux-ci s'expriment, se révèlent (de véritables transformations ont été constatées), découvrant l'existence d'autrui, son respect nécessaire, contestent la loi du plus fort, se socialisent.
Nous sommes évidemment loin de la lecçon de morale ou d'instruction civique !
Nous participons ainsi à cette évolution de l'enfant moderne, évoquée au début de notre brochure, qui nous semble très positive (même si elle entraîne quelques inconvénients en ce qui concerne "l'obéissance"; il faudra de plus en plus justifier et convaincre... les liens familiaux ne pourront qu'en bénéficier).
Nous pensons inutile de souligner qu'une telle action éducative n'a rien de commun avec un quelconque "laisser-faire" ayant le but généreux d'éviter les "complexes" mais aboutissant à une attitude de démission elle-même génératrice de "complexes".

L'école et les parents

Certes, enseigner est un métier, avec ses théories complexes, ses techniques en pleine évolution. Aussi est-il indispensable que les parents soient convaincus que notre action pédagogique est mûrement réfléchie et ne relève pas de notre fantaisie. Aussi est-il vain d'essayer de l'apprécier (ou de la juger) en se référant à des souvenirs d'écolier...
Cependant, nous tenons à fournir aux parents la plus grande information possible afin d'obtenir leur adhésion, car l'enfant ne peut s'épanouir et profiter pleinement de l'enseignement dispensé à l'école s'il n'y a harmonie entre l'éducation reçue à l'école et celle reçue à la maison.
La "confiance" qui nous est parfois accordée une fois pour toute, ne satisfait pas à cette impérieuse nécessité.
Les critiques dont nous avons parfois des échos ("ton maître, ou ta maîtresse, est fou, il ferait mieux de t'apprendre à...") ne créent pas non plus cette harmonie nécessaire ! Elles proviennent d'ailleurs presque toujours de parents n'ayant aucun contact avec les enseignants.
Nous voulons donc obtenir le concours actif des parents et pour cela nous nous efforçons de faire de notre école

une école ouverte

Selon les maîtres, les circonstances, la classe, les voeux des parents, ceux-ci sont invités à :
- assister à la classe pour voir travailler leur enfant (formule à développer dans certaines classes)
- participer à des réunions périodiques (en général trimestrielles) qui se tiennent dans le cadre de la classe. Les problèmes pédagogiques sont alors discutés, les comportements individuels de chaque enfant étudiés (ce qui est très instructif pour les parents).
Des entretiens individuels ont lieu chaque fois qu'ils sont demandés ou qu'ils s'avèrent nécessaires.
Des rapports détaillés sur le comportement des enfants et leur évolution sont remis régulièrement aux parents (2 fois par trimestre, périodicité qui sera peut-être modifiée parce qu'un peu courte pour apprécier une évolution).

Les parents à l'école, simplicité de tous, climat amical
Toujours dans le cadre de l'école, avec la même volonté d'information et de dialogue, les maîtres rencontrent également les parents à l'occasion des séances d'initiation à la mathématique moderne, des débats sur les problèmes d'éducation, dans les commissions de travail organisés par l'association des Parents d'élèves. Notre école semble devoir jouer le rôle souhaitable de Centre Culturel où les parents d'élèves pourraient se retrouver pour des activités d'échange, voire de formation...
Enfin le rôle traditionnel et combien nécessaire de l'A.P.E. pour l'amélioration du fonctionnement de l'école (cantine, patronage du jeudi, informations pour les vacances, autocar, classes de neige, classes vertes, etc...) l'organisation de la Kermesse, de secours, etc... sera appelé à s'amplifier puisqu'une participation des parents à la gestion de l'école est envisagée pour 1968.
Les parents peuvent donc constater que le maximum est fait pour faciliter le contact avec notre école. Nous savons que les conditions harassantes de la vie moderne ne facilitent pas toujours leur présence aux réunions que nous leur proposons. Nous espérons cependant qu'ils seront de plus en plus nombreux à prendre conscience de l'importance des liens que nous voulons établir entre la famille et l'école.
C'est dans un climat d'amitié et de simplicité qu'ils seront reçus !

Nous nous sommes efforcés de répondre avec cette brochure aux diverses questions que peuvent se poser les parents nouveaux.
Malgré sa longueur inévitable bien des détails sont certainement omis. Par ailleurs, nous avons dû utiliser des expressions techniques qui ne sont pas forcément familières à tous.
Nous nous excusons et sommes naturellement prêts à fournir tout éclaircissement nécesaire. En vous remerciant pour votre attention, nous voulons terminer en renouvelant deux mises en garde importantes :
1/ Evitez toute intervention risquant de contrarier le travail fait en classe
2/ Evitez toute comparaison avec le travail qui se fait dans les autres écoles. Si vous avez quelque inquiétude, voyez la maîtresse ou le maître.

ATTENTION : si vous devez déménager, prévenez le Directeur et les enseignants sans tarder. Il est évidemment préférable que tout changement d'école se fasse, sinon en fin de cycle, du moins en fin d'année.