Assemblée Générale du Comité ANACR de Bugeat Gourdon le 24 mars 2012 Chers amis du Comité ANACR de Bugeat, Monsieur le maire de Gourdon qui nous reçoit aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les élus des autres communes, Monsieur le conseiller général, Monsieur le Président de la communauté de communes, Les amis de la FNACA, du comité ANACR de Sornac et enfin je voudrais saluer Bernard Delaunay, co-président du comité ANACR de la Corrèze et aussi membre du bureau national de l'ANACR, accompagné de son épouse. Je voudrais excuser: Cette assemblée sera placée sous la présidence d'honneur de Raymond Vergne, Résistant et président de notre comité de Bugeat. Je souhaite que chacune et chacune de vous participent au débat, à la suite du rapport d'activité que je présenterais et du rapport financier et d'organisation qu' Andrée Laurent vous fera en tant que trésorière. Notre comité souhaite rappeler à notre mémoire, nos disparus en 2011 Antoine VITRAC le 17 janvier Daniel CHAPUT le 28 février André CHAZALNOËL le 12 mars Roger BOURDARIAS le 28 juin Jean MADRANGES le 11 novembre et en cette année 2012 Jean BOUTOUX le 7 mars, mais aussi Alphonse MARLEIX le 17 mars qui avait témoigné dans notre livre. Six étaient des Résistants,de précieux témoins pour notre comité. André CHAZANNOËL et Jean MADRANGES étaient aussi membres de notre conseil cantonal, notre bureau si vous préférez. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 7 résistants dans notre comité de Bugeat. Je vous demande mes chers amis d'observer un moment de recueillement, pour ceux qui nous ont quittés. Maintenant, je cède la parole à M.Joffre, maire de Gourdon. GOURDON-AG - ANACR- comité de Bugeat 24 mars 2012 Rapport d'activité de Bernard BOUCHE Pour certains, on assisterait à une désaffection envers l'histoire ! Notre histoire de France n'intéresserait plus ! Pour d'autres, au contraire l'histoire intéresse toujours, passionne même, pour peu que l'on sache en parler. Les jeunes ne rejettent pas non plus l'étude et la découverte de l'histoire. Ils écoutent et adhèrent à nos propos pourvu que l'on ne leur fasse pas uniquement la « leçon » et que l'on sollicite leurs réflexions et avis, que l'on partage avec eux un savoir, sans manifester la prétention d'avoir raison sur tout, et particulièrement sur la période qui nous préoccupe à l'ANACR, allant du milieu des années 30 à la fin des années 40. Je voudrais, toutes proportions gardées, rappeler les initiatives récentes de notre comité de Bugeat et les enseignements que nous en tirons. En 2009, la présentation de notre exposition « Témoignages de la Résistance sur le canton de Bugeat » dans 6 communes du canton. Beaucoup de visiteurs de toutes générations, y compris des jeunes scolarisés. En 2010, c'est un livre qui est présenté, il reprend l'exposition, enrichie de nouveaux textes, documents et témoignages. Les 500 exemplaires sont vendus en quelques mois, on le réclame encore. Il y avait donc une demande, un besoin de savoir, de mieux connaître la Résistance et ceux et celles qui en ont été les acteurs. L'an dernier à l'AG de Pradines: je disais que ce n'était pas en historiens, car nous n'avons jamais eu cette prétention, que ce livre a été rédigé, mais bien en passeurs de la mémoire, y compris avec les imperfections, les insuffisances voire les doutes . Cela pour dire, que notre activité mémorielle est imparfaite, que l'on peut faire mieux, mais que nous la menons avec respect et honnêteté et sans vouloir blesser quiconque. Nous ne serons jamais dans le camp des révisionnistes, ni de ceux qui instrumentalisent l'histoire, au contraire nous les combattons. Nos cérémonies, chaque année de l'Echameil, des bois de La Vergne, des Bordes et Marcy rassemblent toujours beaucoup de monde, avec un bémol concernant les plus jeunes. Peut-être notre langage et notre discours ne sont pas audibles pour eux dans ces circonstances -là ! Quant à la journée de la Résistance du 27 mai, celle de l'an dernier a connu une moindre participation, que les précédentes. Cette année 2012, il nous faudra faire en sorte qu'elle soit une grande réussite, car elle aura deux particularités: l'élection présidentielle sera passée, celui ou celle qui sera élu reconnaîtra-t-il officiellement cette date du 27 mai? Particularité aussi de part le vote récent de l'Assemblée Nationale, puis du Sénat, faisant du 11 novembre, la journée de la commémoration de tous les morts pour la France. Nous avons toujours dit que nous étions à l'ANACR opposés à toute instauration en France d'une sorte de « Mémorial Day ». De plus, avec cette loi, il serait obligatoire d'inscrire sur les monuments aux morts tous ceux qui sont morts pour la France, ainsi d'anciens miliciens pourraient se retrouver aux côtés des martyrs de la Résistance et de la Déportation, c'est inacceptable. Que le Sénat, dans sa composition actuelle, instruit du danger d'une telle loi, ait pu manquer à ce point de vigilance, nous navre; pour autant nous sommes déterminés à honorer de manière spécifique les morts de chaque conflit, dont celle du 8 mai 1945, victoire sur le nazisme. Donc l'ANACR et notre comité de Bugeat ne feront preuve d'aucune résignation, ni découragement, au contraire sur toutes ces questions de la reconnaissance pleine et entière de la Résistance, ceux qui l'ont faîte, ceux qui ont été déportés, ceux qui ont donné leur vie au combat et qui ont permis de donner à la France, la victoire sur le nazisme et un programme, celui du CNR, j'y reviendrais tout à l'heure. Et pour être toujours mieux ces passeurs de mémoire, notre comité avait proposé à l'AG de 2011 de réactiver notre « Sentier de la Résistance » sur le canton, en le complétant, en l'améliorant, en le rendant plus lisible, et bien sûr en concertation étroite avec les municipalités concernées, ce qui a été fait. Chaque lieu sera ainsi doté d'un panneau explicatif, ce sera le cas pour 10 d'entre-eux, les 3 autres comportent déjà sur les plaques ou stèles les renseignements historiques utiles. Vous avez pu découvrir ces panneaux réalisés par un professionnel, mais rédigés par nous-mêmes, nous aurons l'occasion de les revoir ensemble lors du verre de l'amitié et de la fraternité de la municipalité de Gourdon. La Résistance et la Déportation sont ancrées dans la mémoire collective de ce canton, dans chaque municipalité et ce, depuis la seconde guerre mondiale. Les différentes sensibilités politiques qui se sont succédées dans les conseils municipaux n'ont pas fait place à l'insensibilité, ni à l'indifférence des élus concernant ces faits de Résistance et les drames occasionnés par le régime nazi, d'ailleurs 7 maires sur 11 sont adhérents de l'ANACR. Cela mérite d'être souligné et apprécié à sa juste valeur. Les maires avec qui j'ai discuté récemment, afin que les services municipaux puissent nous aider, pratiquement et techniquement, à installer les socles en pierre et nos panneaux, ces maires ont tous répondu positivement. Je les en remercie. Il serait bien que pour les cérémonies de cette année, ces panneaux soient installés, et on pourrait se donner jusqu'à la fin mai pour terminer ce travail. Je dois aussi remercier la communauté de communes et son président qui ont voté une subvention de 500€, à partager, pour les 2 comités ANACR de Bugeat et Sornac, remercier aussi notre conseiller général qui défend notre projet auprès du Conseil général de la Corrèze. Bien sûr une subvention, quelque soit son montant est toujours la bienvenue, mais ce qui nous importait avant tout, c'est que ce sentier de la Résistance soit « labellisé » en quelque sorte par ces deux instances, c'est une reconnaissance de notre travail mémoriel. La Résistance sur ce canton méritait , je dirais, cet hommage civique unanime! Bien sûr, pour ce nouveau circuit, plus complet, nous rééditerons notre plaquette explicative, avec carte et repères, elle sera disponible avant l'été dans les mairies et à l'office de tourisme de Bugeat. Tout faire pour que ces lieux soient revisités et accueillent de nouveaux visiteurs. Que cette page glorieuse de notre histoire soit toujours mieux connue, comprise et faire que les valeurs portées par la Résistance, consignées dans son programme, celui du CNR approuvé le 15 mars 1944 soient correctement appréciées et que son contenu puisse éveiller les consciences. Ce travail de mémoire, la nécessité de nous rapprocher des plus jeunes, de les faire rencontrer des résistants, des proches de déportés, nous avions au comité de Bugeat fondé beaucoup d'espoir, avec le concours de la Résistance et la Déportation de 2012. Nous avions des outils, des témoins, des lieux de mémoire, des documents pour accueillir des élèves du CM2 de Bugeat. Nous avons entrepris les démarches en temps voulu, auprès de la directrice de l'établissement, relancé à plusieurs reprises avec l'aide de Mme Guillou maire Viam et adhérente ANACR, en vain, ça n'intéressait pas, nous avons eu une fin de non-recevoir, c'est une très grosse déception pour notre équipe. L'enseignement de l'Histoire est en danger, tout le monde le reconnaît avec les réformes successives que l'éducation connaît, constatons que ce n'est pas seulement ailleurs, quel dommage. Chers amis, A chaque occasion, à chaque cérémonie comme dans nos écrits, nous revenons sans cesse sur le contenu du programme du Conseil National de la Résistance. Dans notre bulletin 2012 « Le trait d'union », j'ai écrit au nom du bureau du comité « L'Histoire est un enjeu, celle de la Résistance aussi », je pourrais ajouter le programme du CNR encore plus, arrêtons nous un peu sur cette affirmation. Lors de l'assemblée départementale de l 'ANACR à Ussel, je suis intervenu dans le débat sur « le programme du CNR, presque considéré comme un gros mot, un mot tabou! Alors que des injustices intolérables se multiplient dans notre pays, injustices contraires aux valeurs universelles que porte le programme du CNR, c'est à dire la démocratie, la solidarité, la tolérance, la justice sociale, l'idée que l'intérêt de tous doit primer sur les intérêts particuliers, l'indépendance nationale et la défense de la paix. Ces valeurs de la Résistances sont aussi celles de la République. » Permettez-moi de vous citer quelques phrases d'un tract clandestin distribué en février 1943, par le mouvement de résistance Combat, il titrait: « Manifeste pour la nation française » à savoir, « nous voulons une France libre, nous voulons une France juste, nous voulons une France honnête, nous voulons enfin que la nouvelle République soit celle de la liberté, l'égalité et la fraternité ». Ces trois derniers mots figurent encore sur de nombreux frontons d 'édifices publics, nous les partageons à l'ANACR, le sont-ils par tous dans notre pays, aujourd'hui?On peut s'interroger. Nous n'avons pas le droit de laisser galvauder ces mots liberté, égalité, fraternité. Une association comme la nôtre ne peut l'accepter, en mémoire de ceux qui ont défendu ces valeurs, au péril de leur vie. Le Conseil National de la Résistance, dans sa pluralité, sa diversité, à l'image de notre association ANACR d'aujourd'hui, a été capable d'établir un programme qui a fait l'unanimité de ses composantes: un programme au contenu audacieux, progressiste au sens économique et social. Alors, sans vouloir froisser quiconque, posons-nous cette question. Se référer à ce programme, basé sur la liberté, l'égalité et la fraternité, est-ce le fruit d'un archaïsme nostalgique, voire irraisonné? Non pas! C'est savoir tout simplement d'où l'on vient, savoir reconnaître la valeur de ce qui nous fut légué et savoir se situer dans une perspective de progrès. C'est ce que je pense personnellement au plus profond de moi. Peut-être certains d'entre-vous me diront , que ce programme du CNR « était » moderne, très moderne même, mais il est désormais « daté »! Certes, mais est-ce que cela veut dire qu'il est dépassé? La encore, certainement pas et surtout, que rien n'empêche de le revisiter avec un regard contemporain. Il n'est interdit à aucun candidat à la magistrature suprême de s'y pencher et de faire des propositions en ce sens, à condition de ne pas le transformer en une coquille vide, bien sûr. Si sa valeur n'était pas aussi gênante, pourquoi la pensée libérale actuelle fait-elle le silence sur son contenu? Ou alors, pourquoi jette-t-elle le discrédit sur celui-ci et particulièrement sur la période d'après guerre, avec ses résultats économiques et sociaux, que personne ne peut nier? Et puis, il y a ceux qui l'attaquent frontalement, comme Denis Kessler du Patronat Français en 2007, et ceux qui aujourd'hui encore le vident méthodiquement de son contenu! Le programme du CNR gène beaucoup de monde, parce qu'il montre qu'il peut rassembler des forces sociales, économiques et politiques pour construire de grandes politiques sociales avec de grandes ambitions collectives, en terme de services publics et de protection sociale. Comme le rappelait dans un entretien en 2004, Robert Chambeiron, qui fut secrétaire général adjoint du CNR et président de l'ANACR, je le cite: « La remise en cause de ce que l'on appelle aujourd'hui les acquis économiques et sociaux de la Résistance ne peut qu'être perçue, comme un seul recul historique qui ôterait tout son sens au combat du peuple français pour se débarrasser du régime rétrograde et anti-démocratique de Vichy...car tourner le dos à l'esprit du programme du CNR, c'est tourner le dos au progrès » Fin de citation. Le journal national de la Résistance ANACR « France d'abord » du 4e trimestre 2011 titre: « A l'heure des choix, l'exemple et les valeurs de la Résistance ». Dans le bulletin de juin 2011 de l'ANACR de la Corrèze, L'éditorial « Mémoire et civisme » signé de Bernard Delaunay, ici présent, se termine sur cette phrase: « C'est donc bien une mission civique que d'informer nos concitoyens, pour qu'ils utilisent en toute connaissance de cause le bulletin de vote sous peine de le perdre un jour ». Chers amis , Me voilà au terme de ce rapport d'activité et des propositions pour les mois à venir. J'ai essayé de rappeler dans cette intervention, les valeurs qui guident notre action, avec mes mots, mais aussi en citant d'autres résistants et amis. L'ANACR est pluraliste, ce principe est inscrit dans ses statuts, cela veut donc dire que les adhérents peuvent exprimer des positions différentes sur la vie politique nationale, sur les choix économiques et sociaux, sur l'Europe, ou encore sur les conflits qui affectent la marche du monde. Mais ce qui est essentiel, c'est de dépasser les options personnelles, politiques ou philosophiques pour défendre ensemble les valeurs portées par la Résistance et aujourd'hui l'ANACR. Ensemble nous devons aussi nous retrouver pour lutter de toutes nos forces contre la xénophobie, le racisme et l'antisémitisme. Il va de soi que nous combattons et combattrons à chaque occasion, les organisations qui véhiculent des idéologies d'inspiration fasciste, le négationnisme, la haine, comme le fait le Front National dans cette campagne électorale. Et que d'autres hommes politiques, actuellement en charge de responsabilités, participent par leurs déclarations à cette mise à l'index de certains ressortissants étrangers et aussi de Français depuis plusieurs générations, parce qu'ils sont « différents » pour plusieurs raisons, ne peut qu'inquiéter ceux qui portent les valeurs de la Résistance, étroitement liées à celle de la République Française. Oui, ce langage de haine est dangereux et malsain car, il est historiquement reconnu que lorsque la misère et la désespérance s'installent, cette idéologie revient par la grande porte. Notre pays a déjà connu de semblables périodes, à la veille de l'arrivée du fascisme en Europe,au début des années 1930. Soyons vigilants pour ne pas les revivre. Enfin, je voudrais terminer par un rêve. Puisqu'il est démontré,aujourd'hui, que la « financiarisation » à outrance de l'économie n'apporte pas le bonheur aux peuples d'Europe, bien au contraire. J'ai fais un rêve! Et si les candidats à la présidence de la République française décidaient d'ouvrir un débat vrai et sincère, à partir et en s'inspirant du contenu du programme du CNR, pour proposer une politique économique et sociale audacieuse, où égalité et solidarité deviendraient le fil conducteur? Notre association ANACR ne pourrait que s'en réjouir, car un grand pas démocratique serait franchi, et nous ne doutons pas, que beaucoup de citoyens apprécieraient, avant de voter selon leurs propres convictions, de pouvoir déposer un bulletin dans l'urne en toute connaissance de cause. Je vous remercie. Et maintenant place à la discussion.